Vendredi dernier, le décret « fixant la durée pendant laquelle le prêteur peut imposer à l’emprunteur la domiciliation de ses salaires ou revenus assimilés sur un compte de paiement » a été publié au JO. Est-ce une bonne nouvelle pour le consommateur ?
A partir de janvier 2018, une offre de prêt immobilier, quand elle comporte une telle clause, ne pourra pas imposer pendant plus de 10 ans une domiciliation des revenus sur un compte de dépôt de la banque.
Cette clause de domiciliation devra par ailleurs être plus précise. Elle devra indiquer clairement la contrepartie offerte à l’emprunteur (le plus souvent une diminution du taux du crédit), la durée demandée de la domiciliation (pas plus de 10 ans et pas plus que la durée du crédit) et mentionner les frais de tenue de compte du compte bancaire.
Ce texte est-il une entrave à la mobilité bancaire ?
Dans les banques qui appliquaient déjà des clauses de domiciliation contraignantes, avec indication de la contrepartie, l’impact de la limitation à 10 ans est bien réel et les (futurs) clients en tireront un avantage.
Mais dans la plupart des banques, soit il n’y avait pas de clause de domiciliation, soit celle-ci était présente mais elle était inapplicable (à cause de l’absence de contrepartie). Mais cela était suffisant pour faire conserver à la grande majorité des clients leur compte principal dans la banque finançant leur bien immobilier.
Pour ces banques, elles devront demain faire un choix :
- soit supprimer toute condition de domiciliation et jouer le jeu de la concurrence et de la mobilité bancaire. (C’est d’ailleurs ce choix, assumé et mis en avant, qu’on fait les banques en ligne comme Boursorama et Bforbank)
- soit généraliser cette clause de domiciliation. Et ainsi profiter de cette clause, qui offre désormais une certaine sécurité juridique, pour tenter de limiter une certaine hémorragie des clients vers des banques numériques plus agiles et moins onéreuses.
Pour ma part, je ne pense pas que cette clause va se généraliser. La première raison est qu’une domiciliation de revenus n’empêche pas une utilisation a minima du compte bancaire. Il est ainsi possible de virer tous ses salaires, allocations, remboursements sur le compte afin de respecter la clause, puis faire chaque mois un virement vers une autre banque, qui sera elle utilisée pour le compte principal.
La clause de domiciliation ne pourra pas, non plus, être utilisée par la banque prêteuse pour espérer des frais bancaires supplémentaires. En effet, en incluant une telle clause, les frais de tenue de compte doivent être précisés. Le TAEG devra aussi tenir compte des « frais d’ouverture et de tenue d’un compte donné, d’utilisation d’un moyen de paiement permettant d’effectuer à la fois des opérations et des prélèvements à partir de ce compte ainsi que les autres frais liés aux opérations de paiement ».
Enfin, certaines banques pourraient au contraire choisir d’être un peu plus transparentes en proposant, en option, cette clause de domiciliation. C’est le cas, actuellement, du crédit immobilier proposé par ING Direct. Si le client s’engage à domicilier ses revenus, la banque lui réduit le taux du crédit de 10 points de base et supprime les éventuels « frais de non-respect des conditions d’usage du compte ». Pour un crédit de 200.000 euros sur 20 ans actuellement, cela représente une échéance diminuée de 9,15 euros chaque mois.